[FB] Mise au point

An 1, remparts de Kirigakure no Sato.



Tant de choses s'étaient passées, depuis la fin des Jeux de Yû. J'avais à peine eut le temps de rentrer, que déjà, mes aînés m'avaient écartés du clan à cause de mes "trop nombreuses" fautes. J'étais parti, j'avais fuis mes responsabilités, une énième fois, la fois de trop, à dire vrai. Je n'avais prévenu qu'Hariken et Eijin, sans pour autant leur laisser aucun moyen de me contacter. Mais c'était pour le mieux, cet isolement forcé m'avait permis de mûrir, de grandir, de gagner en sagesse et en expérience, loin du confort qui nous était accordé au sein de Kirigakure.

Une chose était certaine, à partir d'aujourd'hui, je ne fuirais plus.

Contre toute attente, à mon retour, et par le fruit du hasard, je m'étais retrouvé à la tête du clan. Beaucoup de doyens, avaient disparus, et la jeunesse voyait en moi l'espoir d'un avenir meilleur. J'avais connu les guerres de clans, l'avènement de Kiri, et je n'avais jamais hésité à me salir les mains. Tout cela, m'avait beaucoup coûté, trop coûté, et c'est dans l'exil que j'avais trouvé le chemin de ma rédemption.

Les choses avaient bien changées, durant mon absence, et le vent de la révolution s'était mit à souffler en plein cœur du pays de l'Eau, avec une force que je ne lui avais jusqu'alors jamais connu. Je le sentais, la révolte était pour bientôt, et c'est dans cette atmosphère teinté d'effervescence, et au combien pesante, que j'avais dû asseoir ma place au Conseil. Si ce n'est les pour les relations commerciales, je n'avais que de brèves notions dans tout les autres domaines, mais j'avais au moins eu la joie de constater qu'un visage familier en la qualité d'Hariken occupait également une place dans ce Conseil, une présence qui avait su réchauffer mon cœur, et me donner confiance. C'était là toute sa force, après tout, jamais elle ne semblait faiblir, jamais elle ne semblait douter. J'aimais à me dire que c'était une de mes amies les plus proches.

Pourtant, et malgré ce phare dans les heures sombres qui arrivaient, j'étais presque terrifié. Cette rébellion s'était monté bien trop rapidement à mon goût. Etions-nous réellement prêts pour nous attaquer aux têtes dirigeantes du Pays, et du village ? N'avions-nous pas précipité les choses ? Les flammes de la révolte n'étaient elles pas celles qui allaient finalement nous engloutir, et arrêter nos envies de liberté dans l'oeuf ? Tant de questions, et si peu de réponses, l'avenir avait rarement était aussi incertain, mais quoiqu'il adviendrait, je ne fuirais pas.

J'observais le coucher du soleil entre les arbres, donnant sur la mer, depuis les hauteurs des remparts. La réunion avait été relativement monotone, à ma grande surprise, mais j'avais besoin de détente, et de calme. Je venais à renouer délicatement mes cheveux, quand j'entendais et sentais la présence d'une personne que je connaissais bien, me rejoignant. Je n'avais guère pris le temps de me changer, ayant troqué mes vêtements de shinobis pour un kimono de conseiller, noir et aux symboles du village caché, la musculature que j'avais acquise lors de mon entraînement, ainsi mise en avant sans même que je ne le veuille réellement.

" Conseillère Hariken, je ne pensais pas les remparts de notre belle cité aussi prisés. " soufflais-je amusé, en posant mon regard sur cette dernière.

De toutes les décisions prises dans sa vie, Hariken venait parfois à en regretter certaines… Entrer au Conseil de Kiri en faisait partie. Que Benkei soit maudit, lui et ses aspirations. Voilà ce qu’elle pensait au fil des réunions s’éternisant au cœur de la Brume. D’ailleurs, elle ne manquait pas de lui lancer des regards lourds de sens lorsqu’elle se débattait dans ces tâches administratives. Dans le fond, le géant ne servait que de cible évidente pour décharger sa colère, mais il n’était pas si innocent qu’il le laissait croire… Le fait qu’elle ne pouvait en convaincre personne était particulièrement frustrant.

Depuis un certain échange, la Moine avait pris la tête du Temple et s’était partiellement affranchie de sa soumission à la hiérarchie. Piquée dans son orgueil ? Véritable nécessité ? Hasard du Destin ? Cela restait un secret bien gardé entre la martialiste et l’épéiste.  Cependant, là où Benkei l’avait agacée, il en était un qui avait un don pour apaiser les esprits et sa silhouette se dessinait devant elle.

« Conseiller Ushio… Comme tu y vas avec les formalités, taquina-t-elle en singeant le phrasé de son ami.

Contrairement à la plupart de ses proches, Ushio n’était pas une personne fréquentée depuis des années, mais l’homme avait réussi à se rapprocher d’elle comme si cela avait toujours été sa place. Pourtant, l’année qui s’était écoulée ne leur avait pas vraiment laissé le temps de profiter l’un de l’autre. Du point de vue de la Moine, la chose était dommage.

- Après la séance qu’on a eu aujourd’hui, j’avais besoin de m’aérer l’esprit, reconnut-elle en portant son regard sur l’horizon. Puis, maintenant qu’ils sont finis, il faut bien vérifier de quoi il retourne, ajouta-t-elle avec professionnalisme.

Elle avait beau ne pas apprécier ce nouveau rôle et d’ordinaire courir le plus vite possible jusqu’à la sérénité des murs du Temple après chaque réunion, Hariken demeurait dévouée et appliquée. Beaucoup de chantiers avaient été engagés à Kiri et tout avançait bien, en partie grâce au clan Terumi. Songeant aux divers talents du marchand, Hariken observait Ushio d’un air pensif.

- Cela te dérange si je reste un petit peu ?

Par son sang-froid et ses manières, elle reconnaissait sans peine que sa présence était agréable. Le temps lui-même se montrait clément et un vent chargé de sel venait balayer le village en pleine effervescence. C’était un spectacle magnifique, plein de promesse pour l’avenir après cette guerre insensée. Pourquoi le Daimyo et le Mizukage voulaient-ils replonger dans cette violence ? Le Pays de l’Eau se reconstruisait, les femmes et les hommes de Kiri faisaient quelque chose de grandiose juste sous leurs yeux. Etaient-ils aveugles ? Ou le mépris déjà affiché envers les siens s’était-il étendu ?

- C’est vrai qu’elle est belle notre cité… Ce serait dommage de gâcher tout son potentiel alors qu’elle n’en est qu’à ses premiers pas.

Faisant maintenant dos à l’horizon, la Moine couvait de l’œil les bâtisses et âmes se tenant en contrebas. Le vent secouait ses cheveux, les asséchant toujours un peu plus jusqu’à les faire craquer sous l’air marin.

- Toi qui as déjà de l’expérience, tu penses qu’il faudra combien de temps pour que Kiri se développe pleinement ? Combien de temps après pour que cela profite à l’ensemble de notre Pays ? J’ai l’impression que cette année ne nous a permis que de panser les saignements les plus évidents, mais il me paraît évident que les populations ne récupèreront pas d’une guerre de plus de cent ans en une ou deux décennies. »