Bâtir un nouveau monde ! [FB -10]

Des dizaines d'années de guerre, de bains de sang, d'embuscades, de vol et de trahisons. Des morts par centaines, par milliers sûrement, dont tous avaient cessé de compter le nombre. Des familles brisées, des vies enlevées, des clans supprimés de la carte. Oui, les citoyens du village caché de Suna avaient dû endurer le pire avant d'envisager la paix.

Aucun d'entre eux ne souhaitait retourner à cet état de violence perpétuelle.

Aussi, chaque matin, les membres des clans autrefois ennemis se levaient et partaient s'affairer sur les chantiers qui permettraient au village d'exister. L'entente, si elle n'était pas encore cordiale et laissait place régulièrement à des règlements de comptes basés sur de vieilles rancoeurs, se voulait efficace. Les travaux avançaient vite et, sous la gouverne de clans spécialisés, la cité prenait forme.

L'un des chantiers qui prenait le plus de temps, cependant, était celui des quartiers résidentiels. En effet, de très nombreux clans s'étaient réunis derrière Taïga et il fallait désormais s'assurer que chacun aurait un logement. Cela représentait une charge de travail colossal et une technique sans faille puisqu'il fallait assurer la résistance des bâtiments à la météo capricieuse du désert.

C'était précisément là qu'intervenait le clan Yôtei.

Forts de solides connaissances dans le gros oeuvre et disposant de talents héréditaires précieux, ils étaient rapidement devenus les pierres d'ancrages des nombreux chantiers de la ville. Leur maîtrise du Yôton permettait d'avancer à grande vitesse, sans craindre que tout s'effondre pendant la nuit.

- Bonjour à tous ! s'exclama Fudo en baillant une dernière fois. Ceux qui n'avaient pas fini leur bâtiment hier, reprenez le travail. Les autres, suivez-moi pour les plans des logements suivants.

Fudo indiqua brièvement aux autres shinobis les emplacements délimités où ils devraient ériger de nouveaux immeubles et s'assura que chaque groupe de travailleur soit composé d'au moins un utilisateur de Yôton. Comme toujours, il mélangea les clans au hasard. On lui avait donné cette consigne afin d'améliorer les relations entre tous.

Il se retrouva seul avec un étrange ninja aux cheveux noirs et rouges, au regard vide et aux gestes mécaniques.

- Dôsen Jikan, c'est bien toi ? Ravi de te rencontrer, mais ne perdons pas de temps en présentations. 3 jours de travail en tête à tête devraient amplement nous suffire pour apprendre à nous connaître.

Fudo était, comme à son habitude, distant avec son collègue. Il gardait dans son coeur les blessures d'une guerre trop longue et ne parvenait pas encore à faire totalement abstraction des douleurs subies par son clan. Il passa machinalement la main sur le tissu de sa chemise, qui dissimulait trente années de blessures incrustées dans sa chair.

Devant lui s'étalait une grande étendue de sable, aux limites du vilage existant. Le désert s'étendait dans toute sa splendeur.

Au moins, si la compagnie ne l'était pas, la vue serait agréable.

L'idée même qu'un village serait créé dans le désert semblait farfelue, voire impossible. Et pourtant, avec les paroles du Khan, il y avait un grand espoir que ce plan puisse voir le jour. Avec la coopération de chaque clan, il serait possible de rendre le pays du sable habitable et sécuritaire pour chaque famille. Et pour tout dire, c'était un rêve qui m'avait parlé sur plus d'un niveau. Après avoir obtenu la coopération de chaque clan, j'étais l'un des premiers à accepter de prêter main forte pour y construire de nouvelles demeures. Malgré mon apparence, alors que plusieurs regardaient mes jambes faites en bois, j'étais beaucoup plus fort physiquement que l'on peut s'y attendre. Sans parler que, pour tout ce qui est finesse, il n'existe aucun qui puisse rivaliser avec la dextérité manuelle d'un Dôsen.

J'étais présent sur le chantier presque dès le premier jour. Bien sûr, certaines sections étaient plus simples que d'autres. Mais le projet actuel était gigantesque : il s'agissait de s'occuper des quartiers résidentiels. Le coeur de la ville, son âme, sa population y serait concentrée. Et pour nous tous, c'est ici que nos familles résideraient. Lors de cette matinée, alors que j'avais terminé mon précédent travail, un membre du clan Yôtei commença la nouvelle répartition pour la suite du projet.

J'étais franchement impressionner par les membres du clan puisque, plus que tous les autres, tout le village était construit sur leur dos. Leurs compétences étaient capitales pour la création de Suna, je pense qu'aucun autre clan pourrait démontrer une telle expertise. Alors que chaque groupe se formait, il n'en restait finalement plus que deux. Moi et celui qui semblait être le grand responsable de cette partie du chantier. Tout commençait de façon très formelle alors que je me trouvais avec Fudo, un nom que j'avais entendu à quelques reprises. Si j'avais beaucoup influencé les différentes têtes des familles Dôsen, aidant ainsi le Grand khan Taïga a obtenir leur appui, il avait fait des choses similaires au sein de son clan. Sans le connaître personnellement, je l'avais déjà dans mon estime. Je pourrais confirmer si l'homme était à la hauteur que sa réputation. En tout cas, physiquement, c'était le cas. Il me dépassait de quelques centimètres, le bougre !



Je dépliais les plans qu'on nous avait confiés, me plaçant pour que mon nouveau compère puisse voir également les modèles de maisons à construire. Il était fort probable qu'il ait les images gravé en mémoire, mais ça ne m'empêchait pas de faire preuve de décorum. Surtout avec tous les clans qui devaient coopérer, c'était dans les petits gestes que se construisent les bonnes relations. J'étais peut-être plus ouvert d'esprit que d'autres, en vue de ma famille, ce sont des choses qui me venaient sans vraiment réfléchir. Nous étions Suna après tout.



Il était vrai que, si j'avais entendu parler des compétences pour manipuler la lave. Mais mes connaissances étaient limitées à l'aspect ''militaire''. Ne pas être touchée, la distance de sécurité, ce genre de choses. Et ironiquement, il s'agissait d'un des clans de Suna avec lesquels je n'avais pas eu beaucoup d'interactions. Si Fudo était social, peut-être que je pourrais y remédier. De mon côté, alors que je donnais à Fudo le plan afin qu'il puisse confirmer les dimensions du travail, je commençais à effectuer quelques signes avec mes mains. Après quelques mudras et une main déposée au sol, j'invoquais mon pantin. Celle-ci, que j'avais récemment recréée, n'était pas encore complété. Il y avait ici un exosquelette, vide de presque tout. Le visage n'était pas encore terminé, on voyait les traits grossiers qui ressemblaient vaguement à un homme. Avec quelques petits mouvements de mes doigts, la marionnette semblait prendre vie, prête à écouter mes ordres.

Je n'avais besoin que d'un plan de la part de Fudo. C'était lui l'expert, alors j'attendais ses propositions.

- Et bien ! Finalement, il semblerait que nous soyons trois pour ce travail !

Fudo connaissait les capacités du clan Dôsen, mais il n'avait encore jamais eu l'occasion de les voir à l'oeuvre. Leurs savoirs étaient très bien gardés et il n'avait pas eu la chance, ou la malchance, de les rencontrer sur un champ de bataille auparavant. Plus important, en ce qui concernait leur tâche des prochains jours, il savait que les marionnettistes avaient un talent tout particulier pour les finition et les travaux minutieux. Ce qui s'avérait toujours indispensable sur un chantier.

Il jeta un coup d'oeil attentif aux plans blancs sur fond bleu que Jikan avaient apportés et se rendit compte qu'il avait peut-être surestimé leurs capacités à tous les deux. Il s'agissait d'un grand immeuble de quatre étages, chacun comportant quatre appartements spacieux.

Même avec ses aptitudes, Fudo ne pourrait pas faire apparaître le gros oeuvre en un clin d'oeil.

- Pour les fondations, tu n'a pas besoin de t'inquiéter. Nous pourrons travailler dès lors que j'en aurais terminé avec ma partie. Tu vois, c'est une croyance profondément ancrée dans les esprits quand on pense à la maitrise du Yôton, mais qui se révèle profondément fausse. Notre art brûle, certes...

Sur ce, il exécuta une série complexe de mudras, les pieds bien ancrés dans le sol, la respiration constante et contenue. Lorsque ses mains se joignirent dans le symbole du serpent, le sable devant eux commença à se mouvoir, à trembler et à se replier sur lui-même.

L'espace prévu pour la construction sembla s'écrouler sur lui-même, aspiré à une vitesse affolante par une force à laquelle il ne pouvait résister. Fudo pliait le désert à sa volonté et, sous la chaleur indécente du tapis de lave, la zone fut bientôt bouillonnante de magma en fusion.

Une goutte de sueur sur la tempe, Fudo se tourna vers Jikan.

- Mais tu vois, le véritable talent des Yôtei, ce n'est pas de brûler sans réfléchir. Notre pouvoir est bien plus complet que ça.

Coq. Singe. Tigre. Serpent.

La vague de lave s'arrêta subitement de bouillonner, comme ordonnée par une force divine de se calmer. Peu à peu, de lourdes plaques noires apparurent à la surface, couvrant peu à peu tout l'espace qui avait autrefois été le désert. Des craquelures rougeoyantes luttèrent encore quelques secondes, avant de disparaître sous la masse compacte de la roche volcanique.

Fudo sépara ses mains et se recula, tituba et tomba sur les fesses. Créer une aussi grande quantité de lave et de roche volcanique avait consommé une grosse partie de son chakra, mais il ne lui faudrait que quelques minutes pour pouvoir se mettre à travailler.

D'un geste fluide, il attrapa un marteau qu'il lança en direction de sa création. L'outil heurta la roche et rebondit dessus sans y causer le moindre dégâts.

- La roche volcanique. C'est un des matériaux les plus résistants qui soit. Facile à manipuler pour nous, très dur à écraser pour qui voudrait s'y attaquer. Surtout, c'est une matière rocheuse très dense qui apparaît quand le magma refroidit à grande vitesse. Autrement dit, tu peux poser le pied dessus sans craindre la moindre chaleur.

Fudo pointa ensuite du doigt les poutres et les briques amoncelées dans un coin, comme pour signifier à Jikan qu'il était temps de commencer à bâtir les murs. Il lui expliqua que, juste après avoir repris son souffle, il accompagnerait Jikan pour emprisonner chaque élément de construction dans la roche volcanique.

Il ne le montrait pas le moins du monde, mais il adorait toujours exécuter cette performance devant des yeux nouveaux. C'était la fierté de son clan.

Dire que je n'étais pas impressionné par les capacités de Fudo serait mentir. Un art qui s'était peaufiné de génération en génération, cumulant par un spectacle de feu et de terre. Alors que le sol commençait à bouillonner et à prendre des teintes rougeâtres, je plaçais instinctivement mon avant-bras devant mon visage. Comme si ceci pouvait réellement protéger de la chaleur qui se dégageait en ce moment. Puis, d'un geste qui pouvait paraitre simple, le sol redevenait solide et prenait une couleur obsidienne. C'était un énorme effort que Fudo avait donné, devant s'asseoir pendant quelques minutes. Mais comme il me le montrait, aussi bien de vive voix qu'avec le marteau lancé au sol, tout était sécuritaire. Il avait fait ses preuves : je devais faire les miennes à présent !

C'était l'heure de commencer le travail de mon côté. Avec ma première main, je manipulais la marionnette au meilleur de mes capacités. Les poutres étaient prises dans ses bras, une par une, avant d'être placées à l'endroit nécessaire. Une fois que Fudo aurait reprit son souffle, il serait possible de les installer directement dans cette nouvelle fondation. Je profitais de ce petit moment pour m'assurer que plaçais tout au bon endroit. Je décidais de placer les briques pour faire le contour de la zone travailler. Il n'y avait qu'une seule façon pour moi de le faire rapidement. Avec mon autre main, je créais plusieurs fils de chakra qui s'attachaient aux briques mises à ma disposition. Une pour chaque doigt, les briques se dirigeaient dans ma direction. Attrapées au vol par ma marionnette, celle-ci les déposaient sur le sol à une vitesse et une précision hors du commun.

Après tout, si un membre du clan Dôsen pouvait utiliser ses fils pour lancer des kunais et des shurikens de cette façon, rien ne m'empêchait de le faire pour des raisons plus pacifiques. Après tout, ma famille s'était entièrement consacré à l'aspect plus théâtrale de nos capacités. Mais présentement, mon attention était consacrée à mon travail. Je ne pouvais m'empêcher de glisser quelques mots, me remémorant les nombreuses fois que moi et mes frères et sœurs avons travaillé pour créer une nouvelle maison lors de nos déplacements.



J'évitais, pour notre santé mentale commune, de dire qu'il était possible de voir des ''Dôsen'' d'objets voler en même temps. Et je devais dire que ce petit moment me fit énormément de bien. Dès le début de la construction du village, je me sentais plus optimiste. J'oubliais pendant quelques temps la guerre, je retrouvais un peu plus cet esprit que j'avais lors de ma jeunesse. Mais lié avec ce sentiment de nostalgie se trouvait quelque chose de nouveau. Ce qui était fait ici était, pour moi et par les nombreux nomades, nouveau. Je ne sais pas si Fudo ressentait la même chose. Certes, les rumeurs de grandes terres fertiles de leur clan étaient connues... Mais est-ce qu'il sentait ce changement qui entourait tout ce projet ? Ou est-ce que c'était quelque chose qui lui semblait être naturel et anodin ?



Pour les nomades, s'installer ici serait un choc. Et je me demandais combien d'entre nous se disaient la même chose. Certains décideraient peut-être de rester à l'extérieur du village, même une fois celui-ci accomplis. Mais même pour moi, qui désirait construire cet endroit avec ce rêve d'unification du Grand khan, je ressentais à quel point ce changement bouleverserait de nombreuses vies. Enfin, je devrais dire changer pour le meilleur... Mais c'était vraiment une coupure, la fin d'une ère pour la prochaine. Et les changements, aussi merveilleux étaient-ils, pouvaient effrayer... J'étais moi-même incertain de ce que je ferais une fois le village terminée.

Il y avait une forme de magie dans l'art que pratiquait Jikan. D'un simple mouvement gracieux des doigts, il ordonnait aux briques de se soulever et de se placer elles-mêmes. Elles écoutaient sans broncher, comme là avait toujours été leur dessein. Elles étaient inanimées quelques minutes auparavant, elles avaient désormais un but.

En cela, elles ressemblaient beaucoup aux hommes de Suna.

Tout en récupérant son souffle, Fudo écoutait attentivement les souvenirs de Jikan qui, bien qu'ému, tentait de lui raconter l'histoire de sa famille, de son clan. Fudo se rendit compte que, malgré toutes les batailles qu'il avait menées contre bien des clans, il n'avait jamais rien pu apprendre sur ce qui existait en dehors de sa propre tribu.

Le monde, si vaste, s'était rassemblé en un point.

- Je crois que j'aurais aimé assister à l'un de ces spectacles. Les Yôtei n'avaient pas de difficulté à établir des camps fixes sur de longues périodes, c'est vrai, mais les rires et la joie n'étaient pas véritablement notre point fort. Enfin, j'espère qu'ici, dans cette cité construire par nos efforts conjugués, j'aurais la chance de voir les marionnettes s'animer de nouveau.

Fudo s'était relevé, frappant ses mains l'une contre l'autre pour en faire tomber le sable aggloméré. Il s'approcha du périmètre établi par Jikan et, doucement, entreprit d'enserrer les bases de la construction dans de fines gangues de roche volcanique, mètre par mètre. Il repasserait certainement plusieurs couches, pour assurer la solidité du tout, mais il y avait encore beaucoup d'étapes essentielles à un tel chantier.

- Tu es plus jeune que moi et, pourtant, je vois dans ton regard un âge bien plus avancé. Je ne te ferais pas l'affront de te demander pourquoi, parce que j'en connais malheureusement la réponse. Ce que je peux te dire, en revanche, c'est que tu as le droit d'éprouver de la fierté. Ce que nous sommes en train de réaliser, aucun de nos ancêtres ne l'a seulement envisagé. J'ai 30 ans, tu sais et en toutes ces années de vie, jamais je n'ai envisagé de trouver une épouse, de fonder une famille. Je détestais jusqu'à la simple idée d'amener un enfant de plus dans ce bourbier. Mais aujourd'hui...

Fudo fit glisser ses doigts dans les airs et les minces filets de lave qui s'en échappaient se mirent à danser sur le sol, créant de petites silhouettes enfantines qui jouaient avec une balle brûlante. Ils les fit traverser l'enceinte du bâtiment et s'échapper par dessus le premier muret de briques.

Ici, il savait qu'il pouvait mettre au monde une progéniture, sans crainte que la mort quotidienne ne s'empare de leurs corps et de leurs esprits. Il se voyait déjà assis dans un grand fauteuil, les bras chargés d'enfants et de jouets, riant aux éclats avec sa femme. Cet autorisation, enfin, de penser à l'avenir, le fit sourire.

Lorsque la zone à exploiter fut enfin délimitée par Jikan et les premières fondations sécurisées par le magma, Fudo composa de nouveaux mudras et la paume de ses mains commença à sécréter une substance visqueuse et élastique.

- Voici un deuxième talent des Yôtei que peu de gens connaissent et, avec bien peu de modestie, je dois admettre que c'est là le véritable secret de nos habitations. Le caoutchouc volcanique. Résistant, collant et à refroidissement rapide. Si la roche volcanique est la clé de voûte de nos bâtiments, le caoutchouc en est le ciment. Il faudra être rapide pour poser la brique suivante, je compte sur toi.

Il s'approcha de la première brique et déposa une épaisse couche de caoutchouc dessus, qu'il étala ensuite du revers de la main pour l'affiner sur toute la longueur. Le matériau était brûlant, mais émettait déjà quelques bulles. Il serait froid et dur dans quelques secondes.

- Je ne suis qu'un piètre poète mais, tu vois, c'est un peu comme ça que je vois notre village désormais. Nous sommes la clé de voûte et nos enfants, ces générations dorées qui naîtront sans rien connaître de la guerre, seront le ciment.

Fudo adressa un sourire sincère à Jikan, dans lequel il avait l'impression de se retrouver un peu. Cet homme là avait souffert la même vie que lui et éprouvait certainement la même envie de ne jamais y retourner.  

La conversation continuait de façon organique, les briques bougeant pour se placer au bon endroit alors que ma marionnette effectuait d'autres tâches connexes. Bien vite, j'approchais une petite montagne de brique avec l'aide de mon pantin. Ce serait avec un immense plaisir que je l'inviterais à l'une des célèbres pièces de notre troupe. On se souvient tous d'Homlet, la tragédie écrite par le jeune Tamago. Par contre... Je ne sais pas ce que je pouvais bien répondre à ce commentaire disant que j'étais plus vieux dans mon esprit que dans mon corps. Il faut dire que la guerre avait un impact considérable sur tous. Tant de vies balayés dans les sables du temps. Pour certains, des amis. Pour d'autres, des êtres aimés. Pour moi, ma famille... J'ai longtemps été paralysé mentalement par de telles horreurs et de telles pensées. Mais aujourd'hui, je voyais ce nouveau monde qui commençait. Un village qui serait fort grâce à ses fondations. Un village qui serait à la hauteur de nos ancêtres, ceux qui se sont unifiés pour survivre et prospérer. Nous sommes encore loin du résultat, mais c'était le premier pas dans cette direction.

Puis vint ce petit commentaire concernant la descendance de Fudo. Quelque chose en quoi il ne croyait simplement pas possible auparavant. Peut-être qu'il ne pensait pas qu'un futur soit possible et que ça n'avait pas d'importance. Ou peut-être ne désirait-il pas d'attache afin d'éviter la douleur que la perte d'une famille pouvait avoir... Ses choses que l'on pense impossible qui, tout d'un coup, pouvaient devenir réalité. Cet espoir naissant, espérant un meilleur futur. Je ne pouvais que hocher de la tête en entendant ses mots.



J'observais avec grande curiosité la suite de cette démonstration faite par mon partenaire. Vraiment, les secrets des Yôtei me surprenaient de plus en plus. Beaucoup de techniques ont été créé, à la base, pour régler des problèmes pratiques. Par la suite, évolué pour des usages plus destructeurs, c'est cette facette que l'on voyait le plus souvent. Ce retour aux sources était grandement apprécier, surtout dans ce mouvement de coopération. Voir ses aspects différents d'une même capacité ouvrait l'esprit. Et quand on entendait les rumeurs et les histoires concernant les terres fertiles et leurs domaines grandioses, je pouvais facilement en voir la raison devant moi. C'était également à mon tour de bien remplir ma part.


Contrôler une marionnette avec une seule main était une chose extrêmement simple. Dans les faits, il n'était pas rare de voir des marionnettistes expérimenter utiliser un ou deux doigts pour contrôler leurs pantins. Mais plus nous avions de marionnettes à contrôler, plus notre attention était divisée. Alors que nous devions agir avec vitesse, je préparais un second fil de chakra. Avec deux fils et deux mains, la vitesse serait accrue et la précision serait parfaite. Bien que ce soit un nouveau modèle, que je n'avais pas encore entièrement apprivoisé, celui-ci bougeait avec une excellente fluidité.

Le processus continua pendant un bon moment, alors que nous étions tous tous les deux concentrés sur la tâche devant nous. Les murs devenaient de plus en plus haut et de plus en plus nombreux. Après quelques temps à être dans mes propres réflexions, je fais part à Fudo d'une autre interrogation qui me traînait en tête.